
Nous sommes nombreux à vibrer d’un sentiment mélangé :
Un peu de plaisir inavouable, presque coupable. Une sorte d’école buissonnière forcée avec laquelle nous ne sommes pas tout à fait à l’aise. L’Instituteur a beau tenter de nous rassurer en disant que tout le monde aura un bon point, on avance à reculons quand même.
Pour ma part, avec ces années de précarité accumulées, où je suis souvent impuissant à retrouver l’équilibre, c’est comme si j’avais moins peur : nous sommes brutalement tous ensemble devenus des précaires. Une nation de néo-précaires qui se sourit de loin, sans se toucher. Comme si la frénésie trouvait enfin le repos.
Depuis quelques années, j’ai pris la fuite vers la mer, la solitude, le dessin, l’écriture et la rêverie. Venez, on embarque, on largue les amarres et on va regarder par-dessus la Digue du Bout Blanc, là où l’horizon est si vaste et la lumière si pure.
Un jour, mon beau-frère m’a annoncé qu’il venait de perdre son père. Je lui ai répondu : “t’inquiète, c’est pas tellement grave”. Il a éclaté de rire tellement ma réponse était inadaptée. Peut-être aussi que ça le libérait de quelque chose de tellement lourd qui touche à la culpabilité ou à la peur de sa propre mort. Je ne sais pas très bien.
Ce matin, je ressens un curieux sentiment de bien-être. Je ne me l’explique pas, comme ma transat en solitaire. J’ai envie de le partager. Ça ressemble à un vaccin.